Diet+, consommateurs, viandes et anti-oxydants

La réaction des consommateurs face l’enrichissement de la viande avec des anti-oxydants

Contexte et enjeux :

Le cancer colorectal est le troisième type de cancer le plus courant et le quatrième cause fréquente de décès par cancer dans le monde. Selon le World Cancer Research Fund (WCRF), il existe des preuves épidémiologiques solides que la consommation de viandes transformées augmente le risque de cancer colorectal. Sur la base de ces études épidémiologiques, l’OMS a classé en 2015 la consommation de viande transformées comme cancérigène pour l’Homme (Groupe 1). Des études expérimentales ont permis :

  1. de proposer le rôle central du fer héminique et des nitrites pour expliquer l’effet des viandes transformées sur le risque, et
  2. d’identifier que les antioxydants limitent ce risque, ouvrant ainsi la voie à une reformulation des viandes transformées permettant un enrichissement en antioxydant.

Si l’efficacité biologique de cette reformulation a été établie dans plusieurs études, l’attitude des consommateurs face à cet enrichissement est encore inconnue. Cependant, elle peut être étudiée à l’aide de protocoles expérimentaux permettant de tester leurs réactions avant la mise sur le marché de tels produits

Résultats :

Une expérimentation économique a été menée en 2020 sur la plateforme Chemosens de Dijon, pour évaluer les attitudes des consommateurs par rapport à deux jambons fictifs, associés à différents risques de cancer colorectal. Les auteurs se sont concentrés spécifiquement sur la comparaison d'un jambon conventionnel et d'un nouveau jambon hypothétique enrichi en antioxydants, ce dernier présentant un risque réduit de provoquer un cancer colorectal. Les participants à l'étude ont reçu une description des deux jambons avant de procéder à des séries successives d'évaluations des consentements à payer (CAP). Les résultats montrent que le CAP moyen est plus élevé pour le jambon enrichi en antioxydants que pour le jambon conventionnel. Les CAP ont également été impactés par la révélation d’informations supplémentaires sur la réduction du risque de cancer colorectal associé au jambon enrichi en antioxydants.

Sur la base des CAP des participants, ils ont estimé ex ante les impacts économiques liés à la possible introduction du jambon enrichi en antioxydants sur le marché, et les auteurs suggérent qu’il serait socialement optimal de promouvoir ce nouveau produit. La concurrence provenant des étiquetages et des labels déjà existants pourrait considérablement limiter le potentiel de vente de ce jambon enrichi en antioxydants. Cela suggère des approches alternatives comme l’enrichissement obligatoire en antioxydants de tous les jambons vendus. Ces résultats concernent également tous les pays à forte consommation de viande transformée.

Perspectives :

La méthode économique utilisée permet de nourrir le débat sur les options de politiques publiques, en considérant précisément les réactions des consommateurs face à de nouveaux aliments. Comme certains de ces aliments n’existent pas encore sur le marché, les méthodes expérimentales permettent d’anticiper les réactions des consommateurs et leurs consentements à payer pour des produits virtuels, ou en cours de développement. Ces méthodes peuvent être facilement répliquées par des personnes de l’INRAE travaillant sur de nouveaux produits ou de nouveaux procédés alimentaires.

 

Bibliographie :

Marette S., Guéraud F., Pierre F. H. (2021). Regulation and Consumer Interest in an Antioxidant-Enriched Ham Associated with Reduced Colorectal Cancer Risks. in : Nutrients, vol. 13, n° 5.

Date de modification : 05 juillet 2023 | Date de création : 08 novembre 2021 | Rédaction : Régis Grateau